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La visibilité pour tous : Partie 2
Conversation avec… Nadine Spencer, présidente et chef de la direction, Black Business and Professional Association
Nadine, vous nous avez parlé des défis que les entrepreneurs noirs ont dû relever durant la pandémie de COVID-19. Beaucoup d’entreprises noires ont-elles fait faillite?
Tout à fait. Mais le plus grand défi a été la santé mentale.
Je dirige un programme appelé Boss Women Entrepreneurship Training Program pour les entrepreneures noires. Au cours de la deuxième semaine du programme, une de nos séances virtuelles a été piratée par des racistes. Ils ont rejoint la séance avec un signe nazi en arrière-plan, et ont utilisé le mot qui commence par la lettre «n» et nous ont traités de cueilleurs de coton. Ils nous ont dit que nous devrions tous mourir comme George Floyd. Nous avons mis fin à la séance, mais ils sont revenus en tenant des propos dégradants sur le corps des femmes présentes et les ont agressées verbalement. Je pense que c’est l’expérience la plus horrible que j’ai vécue en matière de racisme et de sexisme. C’était horrible.
Néanmoins, nous avons continué la formation, et ces femmes y ont participé tous les jours. L’une des femmes a fabriqué des bougies parce qu’elle s’est rendu compte que les entrepreneures noires seraient probablement celles qui souffriraient le plus durant la pandémie. Elle voulait faire quelque chose pour les motiver et leur insuffler la force de continuer.
Des entrepreneurs se sont suicidés durant la pandémie de COVID-19 parce que leur entreprise a disparu et qu’ils ne pouvaient plus nourrir leur famille. Les propriétaires n’ont pas tous été charitables envers les entrepreneurs noirs pendant la pandémie. Certains de ces entrepreneurs n’ont pas pu faire face à la situation et ils se sont suicidés.
Comment vous battez-vous contre ce phénomène?
En parlant, en collaborant avec les entreprises et en cernant leurs besoins.
Parfois, c’est simple. Une fois, il nous a suffi d’envoyer un plat à quelqu’un. Cette petite attention était importante, car elle montrait qu’on pensait à la personne en cette période difficile.
Comment les entreprises noires qui ont survécu à la pandémie de COVID-19 peuvent-elles s’en remettre?
Nous devons garder espoir et approcher chaque cas individuellement. J’ai donné des séances d’encadrement individuelles de 30 minutes dans le cadre du programme Boss Women. Les ressources offertes par des organisations comme la HSBC nous permettent de communiquer avec des entrepreneurs en ligne pour discuter de leurs besoins et voir comment nous pouvons les aider à réussir.
Ces entrepreneurs ne vont pas retourner à l’école, car ils sont trop occupés à gérer leur salon de coiffure, leur restaurant ou leur magasin de vêtements. Nous travaillons avec eux, les formons et les préparons à de futures crises. Nous avons travaillé avec certaines entreprises pour les aider à obtenir des prêts au titre du CUEC. Et le gouvernement fédéral a lancé le Programme pour l’entrepreneuriat des communautés noires. Nous travaillons donc au sein de cet écosystème pour nous assurer qu’elles disposent des ressources dont elles ont besoin.
Que doivent améliorer les établissements financiers?
Nous avons besoin d’être réellement visibles pour les banques. Par exemple, j’ai ma propre entreprise qui marche très bien, mais je ne peux pas aller à la banque en leggings. Je dois m’habiller impeccablement chaque fois que je vais à la banque, sinon on ne me prend pas au sérieux.
Nous voulons que les banques comprennent que nous sommes des entrepreneurs et que nous avons des talents et de l’expérience, peu importe notre apparence. Voyez-nous, parlez-nous et écoutez nos problèmes afin que nous puissions trouver ensemble une solution. Les établissements financiers sont censés être là pour nous aider à créer et à prospérer, et c’est exactement ce que nous voulons!
Nous voulons encourager le milieu bancaire à examiner les spécificités des entreprises noires. Les cotes Beacon, qui mesurent la solvabilité, sont importantes, mais la cote Beacon d’une entreprise noire n’est pas forcément très bonne. Les établissements financiers doivent tenir compte du point de vue humain parallèlement au point de vue commercial.
Que conseillez-vous aux jeunes futurs entrepreneurs qui ont une idée et qui ne savent pas comment procéder?
Je leur dis que c’est possible. Si je peux le faire, vous pouvez le faire. Ayez confiance. Abordez votre entreprise de manière formelle. Ne pensez pas que vous pouvez aller à la banque avec une excellente idée, sans rien formuler par écrit, et que les choses vont se concrétiser. Vous devez avoir un projet concret. Quelqu’un pourra ainsi l’examiner et s’engager à son égard, ou s’engager à vous aider.
Que dites-vous aux entrepreneurs noirs frustrés et en difficulté?
N’abandonnez pas. Trouvez des personnes qui peuvent vous aider. Nous faisons tous face à des défis, comme quand j’avais 12 ans et que ma mère a déménagé au Canada. Mais à cette période, j’ai toujours gardé à l’esprit ce qui était possible pour mon avenir. Si vous croyez en votre idée, n’abandonnez pas et regardez toujours vers l’avenir.